Les Animaux Fantastiques
Tome 3


Chapitre vingt-deux

  Lorsqu'April reprit conscience, elle dut cligner plusieurs fois des yeux pour être sûre d'être réveillée. Elle ne savait pas où elle était. Tout ce qu'elle savait, c'était qu'elle n'était pas en possession de sa baguette et qu'elle n'était pas seule.

  Elle serra les poings lorsqu'elle vit Emy, debout, appuyée contre le mur.

  — Salut, fit-elle avec un immense sourire, jouant avec la baguette d'April.

  La jeune femme ne répondit pas, sa mâchoire se contractant.

  — Je t'ai connue plus bavarde. Où as-tu mis ta langue ?

  — Je n'ai rien à te dire.

  — C'est un mensonge.

  Les yeux d'April lançaient des éclairs. Il lui était difficile de retenir sa colère.

  — Que veux-tu me hurler, Will ? demanda alors Emy, un sourire mauvais sur les lèvres.

  — Tu as tué Helena.

  La partisante de Grindelwald la regarda longuement, l'impassibilité ayant recouvert son visage.

  — Oui, finit-elle par dire. Et alors ?

  — Je n'arrive pas à croire à quel point tu peux être horrible ! s'énerva April. Tu ne ressens rien quant au fait d'avoir tué ta propre sœur ! Tu es... Tu as beau traiter Aysha de monstre, je crois que tu n'as pas compris que c'était toi le véritable monstre. Tu as tué ta propre sœur !

  Sa voix résonna un instant avant que la pièce ne soit de nouveau plongée dans le silence. Emy la jaugea du regard avant de reprendre :

  — Helena n'avait pas le mérite de vivre.

  — Elle en avait plus que toi, rétorqua la sorcière.

  — Helena avait tout. Elle était aimée sans qu'elle n'ait besoin de rien faire. Elle était intelligente. Elle était aimable. Elle a eu la meilleure vie parmi nous. Et elle osait se plaindre.

  — Alors, tu étais jalouse d'elle, comprit April. C'est tellement... nul. Et pour rien en plus. Oui, tu considères qu'Helena avait une vie parfaite comparée à la tienne. Mais c'est faux. Elle aussi a vécu des choses horribles.

  — Ah oui ? Et je peux savoir ce que tu en sais ?

  Les deux sorcières se lançaient des regards noirs. L'ancienne Poufsouffle finit par lui accorder une réponse :

  — Helena a perdu ses parents à deux ans. Elle était celles qui les connaissaient le plus, tout en n'était pas assez âgée pour avoir des souvenirs clairs d'eux. Elle était l'aînée, par conséquent, elle a toujours dû vous soutenir, Aysha et toi, en s'efforçant de paraître forte. Elle n'a pas pleuré pour vos parents devant vous. Quand Elizabeth et John ont signé ces papiers d'adoption, c'est elle qui vous a permis de vous habituer à cette nouvelle vie en vous montrant qu'il était possible d'être heureux. C'est elle qui devait t'arrêter et réparer tes bêtises. C'est elle qui devait protéger Aysha alors qu'elle n'avait que deux ans de plus ! Elle aussi a vécu ce que vous avez vécu ! Mais elle n'avait personne pour l'aider contrairement à vous ! Helena n'a pas toujours bien agi. Il lui est sûrement arrivé de faire des erreurs. Mais, jamais, elle n'a abandonné et fait du mal volontairement à Aysha. Jamais elle ne s'est montré aussi horrible et cruelle que toi, Emy.

  — Un peu de respect, rétorqua Emy, indignée par les adjectifs qu'on lui associait.

  — Si tu veux mon respect, gagne-le.

  — Oh, alors je l'ai perdu ? s'amusa la partisante de Grindelwald.

  Un sourire malicieux apparut sur les lèvres d'April.

  — Oh, non. Tu ne l'as jamais eu.

  Emy serra les poings, mais prit une grande inspiration afin de se calmer et de reprendre en main la discussion, changeant de sujet :

  — Comment tu penses pouvoir t'en sortir sans tes camarades ?

  — Très bien. Je n'ai besoin de personne. J'ai toujours su me débrouiller seule et ça ne changera pas.

  — Ça pourrait, si tu reconsidérais tes options.

  April fronça les sourcils ce qui poussa Emy à éclairer ses propos :

  — Ton père, Grindelwald, est toujours prêt à t'accueillir et à t'offrir tout ce dont tu n'as pas eu le droit.

  — Je ne veux rien de lui.

  — Alors, tu serais prête à continuer à te battre contre ton propre père ?

  Un silence, mais April le rompit bientôt, après avoir dégluti :

  — Je ne le considère plus comme un père. Il a tué mon frère. Il a tué l'une de ses partisantes pour m'enfermer afin de m'avoir près de lui. Il m'a utilisée depuis qu'il m'a recueillie. Je crois qu'il n'a jamais vraiment été mon père. Jamais je ne le rejoindrai.

  Emy dut cligner des yeux pour être sûre d'avoir bien entendu. Elle resserra alors son emprise sur la baguette qui ne lui appartenait pas et marmonna :

  — Si nous ne pouvons t'avoir, alors personne ne t'aura.

***

  Lorsque Norbert reprit connaissance, la première chose à laquelle il pensa fut le fait que Tina attendait son retour. Il ne remarqua que quelques secondes plus tard que Dean était assis face à lui, la baguette du magizoologiste posée à ses pieds.

  — Salut, Dragonneau, fit l'homme. Ravi de te voir parmi nous.

  Norbert ne répondit pas, alors l'Auror reprit :

  — Navré que tu sois parmi nous aussi. Pardon.

  Le magizoologsite fronça les sourcils, ne comprenant pas. L'homme face à lui n'avait pour tout dire pas l'air du tout dans son assiette. Il n'arrêtait pas de bouger ses doigts et semblait à la fois angoissé et blasé. Un étrange mélange. Lorsqu'il reprit la parole, Norbert n'en fut que plus surpris :

  — Excuse-moi Norbert. Je suis censé te dire que si tu n'acceptes pas de nous apporter ton aide, tu mourras. Et tes amis ont le même choix. Enfin, je ne suis pas censé dire que si tu acceptes de nous aider, tu seras traité comme un moins que rien. Et je suis censé te convaincre que nous rejoindre est la seule solution. Que des mensonges.

  Le sorcier poussa un profond soupir et laissa sa tête se cogner plusieurs fois contre le mur derrière lui. Norbert le regardait, ne sachant pas quoi dire. Il était réellement surpris et dans une réelle incompréhension.

  — Ah désolé, continuait Dean en tendant ses jambes devant lui. Tu ne dois rien comprendre.

  Un silence s'installa pendant quelques secondes, bientôt rompu par le magizoologiste qui hésitait :

  — Tu... Tu n'es pas d'accord avec... Tu ne soutiens plus...

  — Ouais, l'interrompit Dean. Et tu n'es pas obligé de me croire. Ça ressemble sûrement à un piège. Mais c'est la vérité. Alors je me fiche totalement que tu me fasses confiance ou non. Parce je sais que c'est vrai. Et c'est le principal.

  Norbert fronça les sourcils, tentant de déceler quelque chose qui pourrait lui permettre de voir un quelconque signe de mensonge. Mais rien. Il semblait réellement sincère. Toujours incertain quant au fait de le croire, il demanda :

  — Mais... tu as rejoint Grindelwald... je pensais que... nous pensions que tu appréciais réellement ses idées.

  — Oui. C'était le cas. Quand j'ai rejoint Grindelwald, je pensais sérieusement qu'il voulait faire le bien. Que tout ce qu'on faisait de mal était pour un bien futur et encore plus grand. Mais plus on avançait dans le temps, plus je comprenais que ce n'était pas ce que je voulais. Je suis coincé à présent. Car je suis coupable. Peu importe ce que je fais maintenant.

  — Et si tu nous aidais à nous en sortir. Si tu nous disais où étais Grindelwald ? Peut-être parviendras-tu à t'accorder le droit de te faire pardonner ?

  — Non. Je ne suis pas de ceux qui ont le droit à une seconde chance. J'ai fait trop de mal. Et même lorsqu'on m'a laissé la possibilité de retrouver la bonne voie, j'ai continué à avancer sur la mauvaise route. J'ai épuisé toutes mes cartouches.

  — Je ne suis pas...

  — Et pour vous aider à sortir, le coupa-t-il. J'aimerais pouvoir dire oui. Mais je ne suis pas particulièrement puissant ou intelligent, ni même courageux. Je peux essayer de vous aider, mais je ne promets rien.

  — Ce serait...

  — Quant à Grindelwald, l'interrompit de nouveau Dean. Il n'est pas là. Je ne sais pas où il se trouve. Mais il n'est que très rarement ici. C'est Emy son bras droit. C'est elle qui commande presque tout maintenant.

  — Alors... hésita le magizoologiste. C'est elle qui a demandé à Jenny d'incendier la maison de mes parents ?

  Dean hocha la tête avant de murmurer :

  — Je suis désolé pour ton père. Vraiment. Emy est cruelle. Vraiment cruelle. Et je suis son mari. Et je préférerais mourir qu'avoir encore à vivre en tant qu'époux de cette femme. Je préférerais mourir qu'être le monstre que je suis devenu.

  — Dean...

  — Tu n'as pas à me défendre, Norbert. On ne s'est jamais vraiment parlé à Poudlard, mais tu étais très proche d'Aysha, alors je t'appréciais de loin.

  Le magizoologiste cligna plusieurs fois des yeux, surpris, avant de demander :

  — Tu n'aimes pas Emy ?

  La question parut blesser le sorcier qui mit quelques secondes avant de répondre :

  — Je l'ai aimée. Nous nous aimions. Mais, aujourd'hui, je suis forcé de comprendre qu'Emy est plus obsédée par moi qu'amoureuse de moi. Elle a toujours cherché à être aimée, alors, quand nous nous sommes rapprochés, elle a dû voir en moi le moyen d'assoupir sa soif. Elle n'a jamais vraiment été amoureuse de moi. Elle aime simplement être aimée. Elle est mariée à moi. Moi, je suis enchaîné.

  Dean sourit. Ses yeux étaient fous.

  — Je n'arrive pas à croire qu'Emy soit aussi différente d'Aysha. Elles sont sœurs pourtant. Aysha est quelqu'un d'exceptionnel dont on cache la lumière. J'ai toujours beaucoup aimé Aysha.

  — En tant qu'amie ?

  — Oui. Ce n'était pas d'elle dont je m'étais épris. Et on m'a bien fait comprendre que ce n'était pas possible.

  — April, comprit le magizoologiste, un sourire triste sur les lèvres.

  — April, confirma Dean. Et pourtant, j'ai mis du temps à l'apprécier.

  — J'ai mis du temps à apprécier April aussi. Contrairement à Aysha qui a visiblement eu un coup de cœur pour elle.

  — Un coup de cœur ? s'étonna le sorcier.

  — Amical, précisa Norbert en souriant, regardant le vide comme s'il était plongé dans ses souvenirs.

  Tous deux arrêtèrent de parler pendant un instant. Dean sembla vouloir changer de sujet, car il marmonna :

  — J'ai appris que Tina et toi alliez être parents. Félicitations.

  — Merci.

  Ce fut sa seule réponse.

  — Et qu'est-ce qu'on fait maintenant ? demanda alors Norbert.

  — On vous sort de ce pétrin.

***

  Abelforth ignorait où il était. Tout ce qu'il savait c'était qu'il était prisonnier dans une salle, sans sa baguette, et qu'une femme à peine plus âgée que lui le fixait. Il était resté silencieux longtemps, tentant de faire taire les battements de son cœur. Il ne savait pas ce qu'il pouvait faire. Il regardait tout ce qui se trouvait autour de lui dans l'espoir de trouver un moyen de sortir.

  — Ne cherchez pas, Mr Dumbledore, fit la voix de la femme. Vous ne trouverez aucun moyen de vous échapper.

  Le barman se tourna vers elle et lui lança un regard noir.

  — Peut-être appréceriez-vous que je vous parle de votre fils ? demanda-t-elle subitement, l'air hautain.

  — Je ne vous en donne aucun droit. Vous me l'avez enlevé. Vous n'avez même pas le droit de penser à lui.

  — Vous nous avez retiré notre fille. Enfin, Aysha nous a retiré notre tendre Jenny.

  Abelforth cligna plusieurs fois des yeux.

  — Vous êtes la mère de Jenny ? s'étonna-t-il. Les chiens ne font pas les chats.

  La femme lui lança un regard noir.

  — Je vois que vous ressemblez à votre frère sur certains points.

  — Ne parlez pas de mon frère.

  — Préféreriez-vous que je parle de votre sœur ?

  Abelforth serra les dents, incapable de répondre.

  — Elle était jeune quand elle est morte il me semble. Il faut croire que son sort pourrait être le vôtre aussi. Car votre choix est simple... Ou vous nous rejoignez. Ou vous mourez.

  — Jamais je ne vous rejoindrai.

  — Alors votre choix est fait.

  Un sourire sur les lèvres, elle serra la baguette du barman dans sa main et la pointa sur lui. L'air mauvais, elle s'amusa :

  — Vous direz bonjour à Ariana de ma part.

Louise Garénaux - Auteure passionnée
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