Les Animaux Fantastiques
Tome 2


Chapitre trois

  — Achilles ? s'étonna Helena. Comme Achilles Tolliver ?

  Personne ne lui répondit, ce qui sembla être suffisant pour qu'elle en saisisse le sens. Tina dut détourner le regard, son cœur se serrant, tandis que Norbert ne savait pas quoi faire, ses yeux ne cessant de se déplacer de l'Auror à ses côtés à l'homme qui venait d'arriver. Thésée ouvrit la bouche, surpris par une telle intervention, tandis que Dumbledore semblait comprendre peu à peu ce qu'il se passait.

  Aysha lui lança un regard noir et secoua la tête. Sans un mot, elle s'approcha du dénommé Achilles et lui attrapa le bras pour sortir de la pièce. Elle le tira dans un couloir voisin, celui-ci semblant trop perdu et perturbé pour réagir. Lorsqu'elle le lâcha sans douceur, celui-ci heurtant un mur, il revint à lui et son regard croisa enfin celui d'Aysha qui commençait :

  — Vous saviez que Tina était là ?

  — Non, répondit-il sans réfléchir. Je l'ignorais, je vous le jure ! Jamais je ne serais venu si cela n'avait pas était le cas.

  L'Occlumens plissa les yeux, tentant de voir s'il mentait.

  — J'espère que votre relation avec Tina est claire, reprit-elle après quelques secondes de silence. Tina est avec Norbert à présent. Le moindre geste suspect et je vous envoie valser à l'autre bout du pays avant que vous aillez pu dire adieu à votre mère.

  Achilles déglutit et n'eut pas le temps de répondre quoi que ce soit, car quelqu'un s'approchait. Lorsqu'Helena apparut, ce fut Aysha qui poussa un soupir.

  — Qu'est-ce que tu veux ? demanda-t-elle sur un ton sec.

  — Sofia, dit-elle simplement. Il faudrait qu'on parle de notre rencontre avec Sofia.

  — Tu iras seule, finalement. Je n'ai pas envie d'être dans la même pièce que toi pour le moment.

  Son aînée sentit son cœur se serrer et baissa la tête. Elle ferma un instant les yeux avant de s'adresser à Achilles :

  — Retournez auprès de Dumbledore qu'il vous accompagne à votre chambre.

  L'homme ne se fit pas prier. Il disparut en un instant et Helena s'approcha de sa sœur, lui attrapant la main avant que celle-ci ne la repousse.

  — Aysha... murmura-t-elle. Je suis vraiment désolée. Mais je fais ça pour ton bien.

  — Tu t'y prends mal alors.

  Helena poussa un léger soupir, fronçant les sourcils, à la fois blessée et peinée.

  — Je ne veux pas que tu te fasses de mal, c'est tout. Je sais combien April comptait pour...

  — Compte, la reprit l'Occlumens.

  — ... toi, continua l'Auror en ignorant la remarque de sa benjamine, et c'est sûrement pour cette raison que l'idée de la laisser partir t'échappe.

  — Tu refuses de laisser ne serait-ce qu'une chance à ce que je peux dire ou penser. Tu es bloquée dans ton idée et tu es trop bornée pour en envisager d'autres.

  — Tu t'obstines à croire que ta meilleure amie est en vie. Ça va finir par te consummer. Je n'ai pas envie de participer à ça. Tu as disparu pendant des semaines, j'ignore ce que tu as fais, mais je crois que cela a suffit pour te conforter dans tes idées. Je n'aurais jamais dû te laisser partir.

  — Je suis partie parce que j'en avais envie, Helena. Tu ne me contrôleras pas.

  — Le Ministère te laisse beaucoup plus de libertés que n'importe lequel d'entre nous, mais ce n'est pas un raison pour faire n'importe quoi. Dis-moi que tu n'as rien fait de mal. Dis-moi simplement que je n'ai pas à m'inquiéter.

  — Qu'est-ce que tu en sais ? demanda alors la Métamorphomage. Tu veux savoir quoi au juste ? Si j'ai enfreint des lois ? Ou si j'ai tué ? Que veux-tu réellement savoir ?

  Helena ne trouva rien à répondre, secouant la tête, le souffle coupé.

  — J'ai enfreint plus d'une fois les lois sans me faire attraper. Et... j'ai...

  Elle s'arrête et un grognement sortit de sa gorge ce qui surprit son aînée.

  — Et tu as quoi ?

  Aysha lui lança un nouveau regard noir et marmonna :

  — Tu n'es pas prête à le savoir.

  Sans un mot de plus, elle s'éloigna, laissant son aînée en plan, dans une incompréhension des plus totales. Qu'avait-elle manqué de dire ? Que lui cachait-elle ? Qu'avait-elle fait durant les semaines où elles avaient été séparées ?

  Poussant un soupir de dépit, Helena rejoignit de nouveau le bureau de Dumbledore où il ne restait que ce dernier et Achilles.

  — Les autres ont rejoint les chambres que je leur ai attribuées, expliqua le professeur. Une fois que notre concierge sera de retour, il pourra te mener à la tienne. Et... où est Aysha ?

  — Je ne suis sûrement pas la mieux placée vous répondre. On vient de se prendre la tête.

  — Navré.

  — Je suis désolée pour ce qu'elle peut dire. Ça doit être dur pour vous de recevoir sans cesse les faux espoirs d'Aysha.

  — Ne le sois pas. Tu n'es pas responsable.

  — Bien sûr que si. Je suis sa sœur aînée. Il est de mon devoir de la protéger. Mais peu importe ce que je peux faire ou dire, je lui fais du mal. Je pensais qu'on avait trouvé un moyen de s'entendre, mais il faut croire que non. La mort d'April n'a pas touché tout le monde de la même manière.

  Face à la lueur de tristesse qui traversa le regard du professeur, Helena ouvrit la bouche, surprise par ses propres propos, ses yeux semblant témoigner à quel point elle était désolée.

  — Je suis vraiment maladroite, reprit-elle. Je suis désolée, professeur Dumbledore. Je ne voulais pas être si blessante.

  — Tu ne l'as pas été, la rassura Albus avec un faux sourire. Il faut croire que ce que je crois bien faire fait autant de mal à Aysha que pour toi. On ne s'y prend sûrement pas de la bonne manière ?

  Helena ne répondit rien et son regard se posa sur Achilles qui était toujours là.

  — Vous pouvez m'expliquer ce qu'il vient de se passer ? l'interrogea-t-elle alors.

  Le sorcier parut surpris, puis gêné, et baissa la tête.

  — Je... hésita-t-il. C'est...

  — Ce n'est peut-être pas le moment, Helena, intervint Albus, voyant à quel point il était difficile pour le nouveau venu de répondre.

  — Je veux savoir. Je veux comprendre. J'en ai cessé de ne rien savoir.

  Elle posa un regard insistant sur Achilles qui finit par révéler :

  — Tina et moi avons entretenu une relation pendant quelques temps avant qu'elle n'y mette fin dans une lettre. C'était si soudain que je ne l'ai pas vu venir.

  Helena plissa les yeux avant qu'un air compatissant apparaisse sur son visage.

  — Je suis désolée, murmura-t-elle. Ça ne doit pas être des plus faciles d'être ainsi rejeté par la personne que vous aimiez. Enfin... Je comprends un peu la réaction d'Aysha, bien que j'ignorais qu'elle était eu courant pour vous. Je vous conseille de faire attention à ma sœur, elle peut se montrer assez dure dans ses propos. Mais elle n'est pas méchante et n'a généralement que des bonnes intentions.

  — Le généralement ne me rassure pas beaucoup, admit le sorcier.

  — Le plus important est que vous laissiez Tina hors de votre route. Cela est-il possible ?

  Le regard d'Achilles se vida. Il ouvrit la bouche pour répondre oui, mais autre chose en sortit :

  — Non.

  Helena fronça les sourcils, à la fois surprise de tant de franchise et énervée.

  — Je ne comprends pas, reprit-elle. Si vous aimez Tina, ne devriez-vous pas être heureux de la voir nager dans le bonheur, même si ce n'est pas avec vous ?

  L'homme baissa la tête. Albus intervint alors :

  — Ne le blâme pas, Helena. Il est difficile pour tout le monde de dire adieu à la personne qu'on aime.

  Cette fois, ce fut le cœur d'Helena qui se serra le plus, tant ces mots semblèrent douloureux. Elle baissa la tête, refoulant les émotions et les souvenirs que ces derniers faisaient ressurgir. Des larmes emplirent ses yeux, si bien qu'elle dut se tourner pour les cacher.

  — Tout va bien ? demanda alors Achilles qui ne comprenait pas ce qu'il se passait.

  — Oui... marmonna l'aînée des Wilson. Dumbledore a raison. Je suis désolée de m'être énervée sur vous alors que vous avez été le plus franc d'entre nous. C'est juste que...

  Elle s'arrêta, ne pouvant finir sa phrase.

  — Helena ? s'inquiéta Dumbledore. Tu sais que tu peux parler si tu as besoin.

  La concernée essuya ses larmes et se tourna vers son ancien professeur, un air impassible imprimé sur le visage, mais ses yeux rouges trahissaient le fait qu'elle avait pleuré.

  — Je n'ai pas besoin de vous parler, professeur. Pas à vous du moins. Vous avez trop de place dans notre vie. Je refuse de vous laisser amasser nos peines. Ce serait comme si nous vous donnions accès à toutes nos faiblesses.

  — L'amour est quelque chose qu'on ne contrôle pas, reprit tout de même Albus. Ça nous tombe dessus sans prévenir. Ça nous sauve, ça nous détruit. On en rit, on en pleure. Parfois, aimer, c'est savoir laisser partir. Parfois, aimer, c'est laisser l'autre prendre une autre voie si cette dernière semble lui accorder plus de bonheur. Parfois, aimer, c'est abandonner l'autre à la lumière pour ne pas le ternir de notre propre ombre.

  Il s'arrêta et personne dans la pièce ne trouva quelque chose à redire à ses paroles. Ils restèrent silencieux un long moment avant qu'Helena ne rompe leur silence :

  — Eh bien, l'amour, je n'en veux plus si ça fait aussi mal.

  Cette fois, elle ne masqua pas ses larmes.

  — Je refuse de me laisser de nouveau maltraiter par l'amour. Il m'a brisée. Il m'a tout pris. Il m'a laissée au bord du désespoir. J'ai aimé. Ça m'a détruite. Et j'ai beau essayer d'aimer correctement, je fais toujours plus de mal à ceux que j'aime. Le problème n'est pas l'amour en soit. Ce n'est pas ça qui fait le plus mal. Le plus douloureux, c'est ceux qui ne savent pas aimer.

  S'ensuivit un nouveau silence. Les yeux bleus du professeur étant plongés dans ceux bruns de l'Auror. Il ne s'attendait pas à voir tant de souffrance. Jamais il n'aurait imaginé qu'Helena Wilson, la grande sœur forte et douce qui soutenait au mieux ses benjamines en tentant de transformer leur ombre en lumière et leurs larmes en sourires, puisse souffrir à ce point. Que lui était-il donc arrivé ?

  Helena détourna le regard, ce qui sortit le professeur de ses songes.

  — Je le répète, mais, si tu as besoin de parler...

  — Merci, le coupa-t-elle. Mais non merci.

  Et sans un mot de plus, elle s'approcha de la porte, l'ouvrit, sortit du bureau et la referma derrière elle. Elle disparut dans le couloir, tandis qu'Albus Dumbledore se remémorait ce qu'il avait vu dans les yeux de la jeune femme et qu'Achilles Tolliver se demandait où il était arrivé.

Louise Garénaux - Auteure passionnée
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