Les Animaux Fantastiques
Tome 3


Chapitre sept

  Aysha était assise face à Abelforth, sur le lit qu'occupait Croyance, alors que la tête de ce dernier reposait sur les jambes de l'Occlumens. Deux jours étaient passés depuis que Thésée, April, Norbert et Albus étaient partis. Ils n'avaient pas eu de nouvelles depuis et même s'ils savaient que c'était sûrement normal, aucun d'eux ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter.

  — Je vous aime beaucoup, vous savez ? fit soudainement Croyance, d'une voix faible, alors que la pièce était plongée dans un silence pesant depuis un long moment.

  Aysha mit du temps à comprendre qu'il lui parlait et ne put que cligner des yeux, étonnée.

  — Grindelwald...

  Il toussa. Aysha l'aida à se replacer alors que le regard d'Abelforth devenait plus insistant.

  — Grindelwald, reprit le jeune homme, il disait que nous n'étions pas si différents tous les deux. Et... je crois qu'il avait raison.

  Avec un sourire sincère, la Métamorphomage replacer une mèche de l'Obscurial derrière son oreille.

  — Qu'est-ce qui vous fait dire ça ? demanda-t-elle alors que leurs yeux se croisaient.

  — Nous avons tous les deux été des enfants recueillis par une ou des personnes qui nous maltraitaient. Nous avons tous les deux été la source de désir de par notre puissance. Nous avons tous les deux trempé dans les ténèbres afin de mieux en reconnaître la lumière. Nous sommes des blessés de la vie, des laissés-pour-compte. Ceux qu'on pointait du doigt ou dévisageait. Ceux qu'on trouvait étranges, cinglés ou tourmentés. Nous avons été les victimes de malheurs et de leurs conséquences. Des orphelins qu'on méprisait pour leurs différences. Je vous admire, vous savez. Vous êtes une femme exceptionnelle. Après tout ce que vous avez vécu, vous avez gardé foi en l'humanité.

  Une larme roula sur la joue de Croyance qu'Aysha s'empressa d'essuyer avant de répondre, la gorge serrée, touchée par ce qu'il venait de dire :

  — Moi aussi, je vous admire, Croyance. Parce que vous êtes tout autant un être d'exception.

  Aysha leva la tête vers Abelforth pour qui il était de plus en plus difficile de ne pas pleurer.

  — Vous tenez ça de votre père, je dirais, ajouta-t-elle.

  Le barman sourit tristement, une larme s'échappant de son œil droit. Croyance poussa un soupir qui résonna étrangement. Tous savaient sans le dire qu'ils s'approchaient peu à peu de son dernier souffle.

  — Dites... balbutia Croyance alors que l'Occlumens le regardait de nouveau. Dites à Nagini que je suis désolé de l'avoir laissée.

  Aysha ne montrait aucune faiblesse, souriant pour le lui promettre silencieusement. Elle posa une main sur le cœur du jeune homme. Les battements étaient rares, discordants. Son souffle était rauque.

  Ils savaient.

  Le regard de Croyance s'accrocha de nouveau à celui de la Métamorphomage. Cette dernière put alors y lire beaucoup de tristesse, un profond désespoir et surtout de la peur. Son cœur se serra alors qu'elle murmurait :

  — Ça va aller, Croyance. Ça va aller.

  Les paupières de l'Obscurial clignèrent de plus en plus fréquemment alors que sa respiration devenait de plus en plus difficile.

  — Il est temps, Croyance, fit alors la voix d'Abelforth.

  Le barman s'était approché et avait attrapé la main de son fils pour l'accompagner dans ses derniers instants. Il y eut un regard. Un regard rempli de l'amour qu'il ne s'était jamais donné l'un à l'autre pendant toutes les années où ils avaient été séparés.

  Bientôt, la pression des doigts de Croyance sur ceux d'Abelforth diminua, alors que la vie dans ses yeux s'échappaient peu à peu. Aysha vit une dernière larme quitter le coin de l'œil du jeune pour venir se déposer sur sa jambe. Elle sentit les battements de son cœur cesser.

  Le barman ne put plus se retenir. Il se laissa tomber à genoux et se mit à pleurer silencieusement.

  Avec douceur, l'Occlumens vint fermer les paupières du jeune garçon. Ainsi, il avait l'air endormi.

  Aysha ne put retenir plus longtemps ses larmes. Elles dévalèrent. Mais elle restait silencieuse, fixant toujours le jeune garçon dont la tête était posée sur ses jambes. Ce jeune garçon en qui elle s'était vue dès lors qu'ils s'étaient croisés pour la première fois. Elle n'avait jamais vu quiconque qui pouvait comprendre aussi bien qu'elle sa peine et sa douleur. Cela l'avait touchée et marquée. Même si elle ne l'avait jamais dit, Croyance l'avait profondément touchée depuis leur rencontre. Comme il l'avait dit, ils étaient tous deux similaires. Des orphelins. Des laissés-pour-compte. Des victimes. Il était ce qu'elle était. Et elle était ce qu'il était. Et, à présent, ce jeune garçon qui lui était si semblable venait de mourir sous ses yeux. Devant les yeux de son père qui l'avait perdu de vue pendant si longtemps.

  On ouvrit la porte. Helena apparut. Il n'eut besoin d'aucun mot pour qu'elle comprenne que ce qu'ils craignaient tous venait de se passer. Elle resta un instant immobile, ne sachant que faire, avant de s'approcher et de poser une main sur l'épaule d'Ableforth.

  — Il est en paix, maintenant, murmura-t-elle.

  Son regard croisa celui de sa benjamine. Elles s'adressèrent un sourire triste. Elles se comprenaient.

***

  Aysha était assise par terre, face à la porte de sa chambre. Elle ne savait plus depuis combien de temps elle était restée immobile. Suffisamment longtemps pour qu'elle rate ce pourquoi elle s'était préparée. Elle espérait qu'on ne lui en voudrait pas.

  Il n'avait fallu que quelques jours de plus (et un peu de magie) pour trouver un endroit où enterrer Croyance et organiser une cérémonie en son honneur. Aysha s'était préparée. Mais au moment de partir, elle n'avait plus était capable de bouger. Elle s'était assise et était restée immobile à fixer le vide. Elle n'arrivait pas à avaler cette mort. Elle n'arrivait pas à l'accepter. Elle savait que Croyance était mort. Mais cela résonnait en elle comme si ça n'avait pas de sens.

  Comment une personne aussi jeune pouvait mourir de cette manière ?

  Il était vrai aussi que son inquiétude pour le manque de nouvelles qu'ils avaient du groupe partis il y avait maintenant six jours avait décuplé. Elle ne pouvait s'empêcher d'imaginer le pire et elle était pourtant incapable de partir à leur recherche. Elle savait qu'elle n'en n'aurait pas la force.

  La porte s'ouvrit doucement. Tina apparut et la ferma derrière elle. Elle portait une robe noire qui lui donnait un air d'ange déchu malgré la situation. À la vue de l'Occlumens, l'américaine vint s'asseoir sans un mot face à elle. Leurs regards se croisèrent et Tina lui adressa un timide sourire.

  — Je suis désolée... fit alors Aysha d'une voix faible, comme si elle n'avait pas parlé depuis des jours.

  — Ne le sois pas, Aysha. Je comprends.

  Une larme roula sur la joue de la sorcière.

  — Personne ne t'en veut de ne pas être venue. Nous ressentions tout de même ta présence.

  — C'est juste que... Je... Je voulais y aller. J'ai même fait l'effort de porter du noir. Je me suis changée et préparée. Et au moment de quitter la chambre pour vous rejoindre... je ne sais pas... c'était comme si tout m'était retombé dessus d'un coup.

  — Je comprends, Aysha. Je te promets.

  — Tu es une personne vraiment courageuse. Tu étais très attachée à lui et toi aussi tu as vécu des choses horribles, toi aussi tu es inquiète pour Norbert... Tu es plus forte que moi. Ne pas être allée à cet enterrement improvisé était une faiblesse de ma part. Et vous avez le droit d'être en colère contre moi.

  — Personne n'est en colère contre toi, Aysha. Oui, j'étais attachée à lui. Mais personne ne réagit de la même manière face à la mort de quelqu'un. Ne te blâme pas. Tu es forte toi aussi. Peut-être plus que n'importe lequel d'entre nous. Et... oui, je suis vraiment inquiète pour Norbert... pour les autres aussi, mais je suis sûre qu'ils reviendront bientôt.

  Aysha sourit, comme pour la remercier.

  — Je t'aime beaucoup, tu sais, fit-elle alors.

  Tina parut surprise, mais elle renchérit :

  — Moi aussi, je t'aime beaucoup, Aysha. Tu es un peu devenue une sœur pour moi et tout ce que tu as toujours fait pour moi, pour Norbert, pour Jacob et Queenie... je ne te serai jamais assez reconnaissante.

  — Je n'ai rien fait de spécial.

  — Au contraire. Je crois que tu ne réalises pas... Tu penses n'avoir fait que du mal autour de toi... mais c'est faux. Tu as fait beaucoup de bien à beaucoup de monde. Sans même le remarquer. Tu t'es révélée d'un réel soutien tout au long de nos mésaventures. Car tu es courageuse et drôle. Et forte aussi, c'est vrai. Je suis vraiment heureuse que ce soit toi qui m'aies menée à Norbert pour notre mariage. Je comprends pourquoi Norbert est aussi attaché à toi. Pourquoi ta sœur t'aime à ce point. Pourquoi les Dumbledore te considèrent presque comme leur propre fille. Pourquoi Croyance t'a appréciée si rapidement. Pourquoi Queenie a immédiatement eu foi en toi sans même pouvoir lire dans ton esprit. Tu es une bonne personne, ne l'oublie pas. Et tu auras beau me dire tout ce que tu veux, je ne changerai pas d'avis.

  Aysha sourit, ne sachant pas quoi répondre. Tina s'approcha alors pour lui prendre la main en signe de soutien et elles restèrent ainsi un long moment.

  — J'aurais aimé te connaître plus tôt, fit soudainement l'Occlumens. Je suis heureuse de t'avoir rencontrée. Je ne sais pas ce que j'aurais fais si cela n'avait pas été le cas.

  — Tu t'en serais sortie, s'amusa Tina. Comme toujours.

Louise Garénaux - Auteure passionnée
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