Les Animaux Fantastiques
Tome 1


Chapitre second

La première réaction qu'eut Albus Dumbledore en voyant Aysha débarquer dans son bureau, à présent vide, fut la surprise. Surprise vite remplacée par de la joie. Il avait serré chaleureusement sa main en souriant ce qui avait coûté une grimace de la part de l'Occlumens et un rictus d'April. Après avoir exprimé le bonheur que lui procurait ces retrouvailles, le Legilimens se racla la gorge et reprit son air calme et taquin à la fois avant de déclarer :

- Vous partez demain vers le port pour vous rendre au Brésil. En attendant, je t'ai préparé une chambre, Aysha, pour que tu puisses t'y reposer. Je vais t'y emmener. Et je vais voir avec le Ministère pour ton poste.

D'un geste de la main, il invita tout le monde à sortir, ce qu'ils firent sans se faire prier. Norbert et April saluèrent timidement les deux autres sorciers qui s'engageaient déjà dans un des nombreux couloirs du château et s'éloignèrent. Après quelques minutes de silence et de contemplation pour la jeune femme, Albus, d'une voix hésitante, demanda :

- Tu as été mise au courant pour Leta ?

- Malheureusement...

Sa voix s'était perdue dans le brouhaha soudain des élèves sortant des cours, ce qui n'empêcha pas Albus de comprendre qu'il partait sur un terrain glissant.

- Vous n'avez pas cours ? demanda Aysha, coupant le fil de pensées du professeur.

- Je suis quelque peu occupé alors notre charmant directeur a trouvé un moyen de me remplacer.

Sans un mot de plus, ils s'engagèrent dans un énième couloir non sans avoir emprunté quelques escaliers.

- Est-ce que la reprise du travail s'est bien passée ? questionna Albus en souriant.

- Oui, enfin, je crois, répondit-elle sur un ton plutôt froid et distant qui fit comprendre au Legelimens qu'il s'agissait, là encore, d'un sujet délicat. Nous sommes bientôt arrivés ?

Albus se contenta de hocher doucement la tête, attristé de voir l'état d'Aysha avant de lui indiquer une porte cachée dans le mur et de lui préciser qu'il s'agissait de sa chambre. Sans rien ajouter, il la laissa découvrir les lieux, qui malgré leur beauté, ne coutèrent aucun sourire d'admiration de la part d'Aysha. La sorcière se contenta de poser ses affaires et de se débarrasser de son manteau qu'elle posa sur un fauteuil en face d'une cheminée. D'un coup de baguette, sa valise, posée à terre, s'ouvrit et le livre Vie et habitat des animaux fantastiques en sortit, se déplaçant en lévitant vers la jeune femme qui poussa un profond soupir. Elle caressa la couverture et une larme roula sur sa joue, finissant sa chute sur le dos de sa main. Finalement, sans même l'avoir ouvert, elle déposa le livre sur une commode se trouvant derrière elle et sortit de ses appartements en verrouillant la porte avec un simple Collaporta. Errant dans les couloirs et ne saluant que passablement les portraits et les fantômes qui passaient, elle se retrouva bientôt devant une salle qu'elle connaissait bien. Poussant doucement la porte, qui, contrairement à la précédente, ne lui demanda pas de la chatouiller à un endroit précis, elle ferma les yeux, prise de souvenirs. Incalculable était le bon mot pour qualifier le nombre de fois où elle s'était assise là, devant ce miroir qui ne montrait son reflet qu'à l'Homme le plus heureux de la Terre. Depuis des années, elle y voyait toujours la même chose.

D'un pas lent et uniquement guidée par sa mémoire, Aysha entrant, fermant la porte derrière elle, et se dirigea vers l'imposant objet au milieu de la pièce. Ses paupière se soulevèrent, révélant ses magnifiques et envoûtants yeux verts que nulle larme ne pouvait ternir. Aussi doucement que possible, elle attrapa le drap blanc qui recouvrait ce qui lui était familier et le tira afin qu'il atterrisse à ses pieds, dévoilant un magnifique miroir doté d'un cadre en or. Une inscription était gravée sur le dessus qu'Aysha avait traduit en lisant de droite à gauche et en reformant les mots par la phrase Je ne montre pas ton visage mais de ton cœur le désir. Enfin, la sorcière reporta son attention sur le miroir en lui-même où apparurent deux personnes. Un homme, plutôt petit, brun aux yeux verts et une femme, de taille moyenne, blonde aux yeux bruns. Tous deux souriaient, et, même s'ils importaient beaucoup pour l'Occlumens, elle ne les avait jamais vus en vrai, uniquement sur des photos défraîchies et sur ce miroir, qu'elle aimait tant contempler. Alors qu'elle continuait de fixer l'objet, elle ne remarqua pas que quelqu'un était entré. Seul sa voix la sortit de ses pensées :

- Je me doutais que je te trouverais là.

Aysha se contenta de baisser la tête, ayant reconnu la voix.

- Thésée... murmura-t-elle. Je suis heureuse de te voir...

Le sorcier ne répondit pas et s'avança pour se poster à côté de l'Occlumens. Un silence régna qu'aucun des deux sorciers n'osa briser. Finalement, Aysha releva la tête et fixa quelques secondes le visage marqué de fatigue de l'Auror à ses côtés. D'une voix hésitante, elle demanda, tout en repassant une mèche derrière son oreille :

- Comment vas-tu ?

- Aussi mal que ce que mon visage le laisse paraître.

Son ton froid tendit immédiatement Aysha qui dut se forcer à ne pas baisser les yeux.

- Je suis désolée, finit-elle par murmurer.

- Tu n'as pas à l'être...

- J'aurais dû être là, le coupa la sorcière en se tournant totalement vers lui.

- Mais tu n'étais pas là, soupira l'Auror sur un ton de reproches. Le mal est fait.

Aysha se mordit la lèvre inférieure. Elle s'en voulait tant pour de nombreuses choses que le ton que son collègue avait employé lui parut mérité. La gorge serrée, la jeune femme reprit :

- J'ignore si...

- Que vois-tu dans le miroir ? l'interrompit-il sans prendre en compte les larmes qui emplissaient les yeux de son interlocutrice.

- Des personnes qui me manquent, répondit simplement l'Occlumens après une courte pause.

- Leta me manque. C'est elle que je vois.

Un silence suivit cette annonce ne surprenant aucunement la sorcière qui retenait toujours ses larmes.

- Je sais à quel point Leta et toi étiez proches, finit par dire Thésée sur un ton conciliant. Mais elle n'a jamais apprécié le fait que tu aies essayé de l'éloigner de Norbert.

- Elle n'était pas la bonne personne pour lui.

- Elle l'aimait.

- Et elle t'aimait ! s'exclama Aysha sur le point de fondre en larmes. J'ai fait des erreurs. De nombreuses erreurs que je regrette et que je ne peux réparer. Mais s'il y a bien une chose que j'ai faite qui n'en était pas une, c'était ça.

Elle indiqua d'un geste de la main l'annulaire du jeune homme où devait se trouver une alliance si tout s'était bien passé.

- Tu es pathétique, murmura l'Auror fixant toujours le miroir.

- Je sais.

La réponse de la sorcière résonna quelques instants dans l'esprit de Thésée. Pour rien au monde il n'aurait voulu être méchant avec une personne qui avait aussi perdu une meilleure amie et qui n'était pas réellement en cause, mais ses paroles, bien que blessantes, n'affectaient aucunement l'ancienne Serdaigle. Elle le sait, se répéta-t-il silencieusement. S'il ne l'avait connu que par le biais de son frère et de son travail, il savait pertinemment qu'elle ne s'aimait pas. La voir se faire souffrir autant l'avait toujours brisé. Elle ne le mérite pas, songea-t-il sans se rendre compte que la personne à qui il pensait s'était assise, ses bras serrant ses genoux repliés contre sa poitrine. Lorsqu'il le remarqua, il l'imita et engagea une nouvelle discussion d'une voix plus hésitante :

- Je suis désolé, je ne voulais pas être si...

Il s'arrêta, cherchant le bon mot parmi toutes les possibilités, mais il n'eut pas le temps de compléter qu'Aysha avait déjà terminé :

- Sincère ?

Sa gorge se noua. Il s'en voulait pour ce qu'il lui avait dit, mais, elle ne semblait pas trouver cela offensant. Pourquoi en était-il étonné ? Il en avait l'habitude. Peut-être espérait-il simplement qu'elle ait appris à s'aimer avec le temps, mais son séjour à Ste Mangouste semblait avoir eu l'effet inverse.

- Je vais me reposer, annonça l'Occlumens en se levant. Tu devrais faire la même chose, tu as une mine affreuse.

Auparavent, un sourire malicieux aurait accompagner ses paroles. Elle le salua d'un mouvement de tête qu'il aperçut à peine et sortit de la pièce.

Marchant dans un silence de mort, ne relevant la tête que pour saluer passivement les fantômes qu'elle croisait, Aysha ressassait un tas de souvenirs qui tournaient en boucle dans sa tête. Encore dans ses pensées, elle percuta accidentellement une armure qui s'écroula au sol. D'un mouvement de baguette, elle remit tout en place et repartit, maudissant sa maladresse.

Après avoir traversé de nombreux couloirs et emprunté quelques escaliers toujours aussi capricieux, l'Occlumens arriva dans ses appartements où elle se laissa tomber dans le fauteuil où reposait son manteau. Sa baguette toujour dans la main, elle l'agita en murmurant un Accio qui apporta à la jeune femme le livre qu'elle avait posé sur l'un des meubles. Tournant les pages doucement, elle feuilleta rapidement l'ouvrage et s'arrêta une fois arrivée aux Niffleurs, dernières créatures qu'elle avait pu voir, en dehors de Pickett, et qui avait fait des ravages chez une famille de Moldus qu'il avait fallu oublietter. Doucement, ses yeux se fermèrent et elle sombra dans un sommeil agité.


- Endoloris !

Une douleur traversa son corps tandis qu'elle hurlait, suppliant que tout s'arrête. Mais cela recommença, de nombreuses fois. Le visage tordu de douleur, la victime s'arrêta soudain de crier et une voix sifflante retentit :

- Tu n'as que ce que tu mérites. Endoloris !


Pas de cri, juste le réveil en sursaut d'Aysha. Encore ces rêves. Poussant un soupir, elle se leva et manqua de tomber en trébuchant sur le livre à ses pieds. Elle l'avait fait tomber alors qu'elle s'était assoupie. La sorcière se baissa pour le ramasser, ainsi que sa baguette. En se relevant, elle fut prise de vertiges et dut porter une main à sa tête. Le manque de sommeil ne l'aidait guère dans sa situation. Et, non seulement elle dormait peu, mais elle dormait aussi mal quand elle y parvenait. Après avoir repris ses esprits, elle posa le manuscrit sur le fauteuil et rangea sa baguette avant de se diriger vers un grand miroir et de scruter son reflet. Malgré sa grande fatigue, aucune cerne n'apparaissait sur son visage, pas même la trace du combat qui l'avait opposée à un fanatique de Grindelwald quelques jours plus tôt. Ses cheveux blonds lui arrivaient à peine en-dessous des épaules. Elle remonta la manche de son bras droit jusqu'au coude, et, là encore, la marque d'un ancien combat avait disparu. Qui aurait pu croire qu'elle manquait de sommeil et qu'elle s'était battue ? Personne qui n'aurait fait que la regarder.

Un bruit sourd la fit sursauter et elle remarqua que quelqu'un avait frappé à sa porte. Sans même dire un mot ou demander qui venait lui rendre visite, elle alla ouvrir la porte et scruta un instant la personne qui se tenait devant elle.

- Dean... finit-elle par murmurer.

- Aysha, je suis ravi que tu aies accepté.

Elle ne répondit pas et se contenta de se tourner pour laisser entrer son ami. Une fois la porte fermée, elle rejoignit son invité surprise qui fixait sa valise et demanda :

- Que fais-tu là ?

- Je viens rendre visite à une amie. Ai-je encore le droit ?

Aysha se contenta de baisser la tête ce qui coûta un soupir de son ami qui déclara :

- Tu m'as manqué.

L'Occlumens ne répondit pas. Bien sûr qu'il lui avait manqué, mais elle avait été responsable de leur séparation, alors elle se tut. Pour une fois, elle ne dit rien, ne rétorqua rien de blessant. Elle voulait chasser sa véritable nature...

Louise Garénaux - Auteure passionnée
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