Les Animaux Fantastiques
Tome 3


Chapitre second

  Quelques heures étaient passées depuis que le groupe venu de New York avait mis de nouveau un pied en Angleterre. Ils avaient eu le temps de passer dans la nouvelle maison de Queenie et Jacob, ainsi que chez Norbert pour y déposer un maximum d'affaires et avaient ensuite été invités chez les parents des frères Dragonneau pour le dîner.

  Le repas était succulent pour beaucoup et l'ambiance allait bon train alors qu'ils parlaient de tout et de rien, oubliant pendant ces quelques instants ce que le monde entier était en train de vivre : la peur quant à l'incapacité de tous de trouver où se cachaient Grindelwald et ses partisans.

  — Je vous jure ! s'exclama Jacob alors qu'il venait de conter l'une de ses aventures dans sa boulangerie. Cette dame là avait un drôle de caractère si bien que je n'ai même pas pu lui vendre quoi que ce soit, car elle me demandait du jambon !

  Quelques rires. Anne semblait grandement apprécier le Moldu et ne cessait de lui poser des questions sur sa vie et comment il avait découvert la magie.

  — J'aurais tellement aimé voir ce qu'il s'est passé dans cette banque, commenta Aysha. D'ailleurs je lui en suis reconnaissante, car c'est grâce à elle que nos deux jeunes mariés se sont rencontrés et c'est aussi ce qui a permis la rencontre de Jacob et Queenie. À croire qu'elle a une double fonction d'entremetteuse.

  — Faudrait peut-être que t'y mettes les pieds, toi aussi, fit alors Helena en fixant sa sœur et donnant un coup de pied discret à Thésée.

  Ce dernier sortit subitement dans ses pensées et se trouva pris au dépourvu, car il n'avait absolument pas suivi leur conversation.

  — Tout va bien, Thésée ? s'inquiéta alors sa mère. Tu n'as pas l'air au plus haut de ta forme.

  — Oh... marmonna-t-il. Je suis juste fatigué. La journée était rude.

  Anne attrapa la main de son fils aîné, sachant évidemment que ce n'était pas la vérité. Elle le connaissait trop bien pour se laisser berner.

  — D'ailleurs, si vous n'en voyez pas d'inconvénient, je vais vous laisser. Je dois aller à l'étage et récupérer certaines choses.

  Il n'attendit pas de réponse et se leva, gardant son regard fixé sur sa mère.

  — Bien sûr, mon chéri, murmura-t-elle alors. Nous te garderons une part de la tarte que j'ai faite.

  — Ne t'en fais pas pour ça. Tu peux la donner à qui la voudra.

  — Je la réclame ! s'écria alors April avec un immense sourire. Pardon, ce n'était peut-être pas approprié.

  — On commence à te connaître, April, s'amusa Helena. Ça ne m'étonne même plus.

  — Mais ?! Qu'est-ce que ça veut dire ?

  L'aînée des Wilson éclata de rire face à l'air faussement outré de la jeune femme. Thésée jeta un coup d'œil à la voisine d'April, Aysha, mais celle-ci était elle-aussi plongée dans ses pensées et ne remarqua pas son regard. Il poussa alors un soupir, ignorant que sa mère avait vu qui il venait de regarder. Il salua de nouveau tout le monde et disparut bientôt.

  — Je vous l'accorde, il est bizarre aujourd'hui, fit alors April après un temps. Plus que d'habitude je veux dire. Tu ne trouves pas, Aysha ?

  L'Occlumens tourna la tête vers elle et la fixa un instant.

  — Laisse-moi deviner, reprit sa meilleure amie. Tu n'as absolument rien suivi, c'est ça ?

  Pour toute réponse, la Métamorphomage cligna des yeux.

  — Y en a pas un pour rattraper l'autre, se moqua April en faisant allusion à Thésée.

  — Je reconnais bien Aysha, fit alors Richard avec un sourire alors qu'il n'avait que très peu parlé depuis le début du repas. Elle a tendance à se perdre dans ses pensées aux moments les plus improbables qu'il soit.

  Aysha sourit alors.

  — À quoi pensais-tu donc, ma puce ? demanda alors Anne.

  — Il vient de partir, marmonna April d'un air innocent.

  Seules Aysha et Queenie l'entendirent, mais aucune ne fit un commentaire.

  — Rien de spécial, répondit la jeune femme.

  — Au fait, reprit alors Richard. J'ai appris par un ami que tu avais un projet important ? Pourrions-nous avoir quelques informations ?

  — Oh, c'est un secret, répondit la sorcière avec un sourire malicieux. Eulalie et Norbert sont au courant.

  — Tu m'intrigues davantage encore ! J'ai hâte de savoir ça ! Je vais éviter de cuisiner Norbert, car il y a de grandes chances qu'il finisse par lâcher l'affaire.

  Le magizoologiste s'empourpra ne sachant pas quoi dire face à cette remarque. Tina sourit, lui attrapant la main sous la table.

  — Je rigole, Norbert. Je ne voulais pas t'embarrasser.

  — Tu fais toujours ça, chérie, commenta sa femme. Ça me rappelle quand tu avais passé la soirée à l'interroger sur la journée qu'il avait passé lorsque Leta et Aysha sont venues à la maison pour la première fois.

  La mention de Leta semblait ne plus être aussi douloureuse qu'avant, même si un air triste planait toujours dans l'air.

  — Vous avez fait ça ? s'amusa Aysha.

  — Il fallait bien. C'était la première fois qu'on accueillait des amis de Norbert à la maison. Qui plus est deux charmantes jeunes filles. Je n'ai pas beaucoup eu l'occasion de voir Leta, mais comme Aysha traînait plus chez nous que chez elle après ça, je me suis vite attachée à cette enfant merveilleuse.

  — Vous allez me faire rougir, railla la sorcière.

  — Et dire que je pensais que Norbert et toi alliez finir ensemble, s'amusa le vieil homme. Sans vouloir vous offenser, Mlle Goldstein.

  — Oh... fit la concernée. Ce n'est rien. C'est compréhensible.

  Richard sourit avant de se tourner vers sa femme pour ajouter :

  — J'aurais preque aimé avoir un autre enfant pour l'avoir comme belle-fille.

  — Pas forcément besoin d'un autre, ne put s'empêcher de dire Anne.

  Les joues d'Aysha s'empourprèrent alors qu'elle s'enfonçait dans sa chaise et se terrait dans le silence. Se rendant compte de ce qu'elle venait de dire à voix haute, Anne se leva, posa une main sur l'épaule de son mari qui essayait de comprendre ce qui venait d'être dit, et lui demanda :

  — Tu peux aller chercher le dessert, chéri, s'il te plaît. Je reviens de suite.

  Il n'eut pas le temps de répondre qu'elle partait déjà, quittant la salle à manger et empruntant rapidement les escaliers pour aller à l'étage. Elle n'hésita pas longtemps et se dirigea vers l'ancienne chambre de Thésée où elle frappa à la porte. N'ayant pas de réponse, elle ouvrit tout de même la porte doucement et sourit lorsqu'elle vit son fils assis sur son ancien lit, regardant dans le vide. Elle ferma la porte devant lui et vint attraper la chaise du bureau pour s'asseoir en face de son aîné.

  — Tout va bien, Thésée ? demanda-t-elle alors. Et ne me dis pas que tu es fatigué, car je sais que c'est un mensonge.

  L'Auror leva la tête vers sa mère et lui accorda un sourire triste.

  — Oui... c'est juste que je suis un peu dépassé en ce moment. C'est la panique dans la plupart des Ministères. Il y a des traces d'actes de Grindelwald aux quatre coins du monde, mais aucune preuve, ni aucun indice quant à l'endroit où il pourrait se trouver. Le taux d’homicides a grandement augmenté depuis l'élection et je ne sais plus quoi faire. J'ai l'impression d'être totalement inutile. Et perdu aussi. Et puis, je les vois, si heureux et forts. Ils arrivent à vivre avec ça. Ils se battent contre tout ça. Ils partent sur le terrain. Et moi, je reste terré dans mon bureau à donner des ordres et remplir de la paperasse.

  Anne attrapa la main de son fils et, d'une voix douce, lui répondit :

  — Tu n'es pas inutile. Tu travailles simplement différemment à une autre échelle. Les temps sont durs. Il est normal de se sentir dépassé. Mais tu n'es pas faible ou je ne sais quoi. Tu as juste beaucoup de poids sur les épaules et... le cœur aussi je crois.

  Thésée cligna des yeux, surpris. Alors, la vieille femme reprit, un timide sourire sur les lèvres :

  — Ai-je raison de penser qu'il se passe quelque chose entre Aysha et toi ?

  L'Auror ne répondit pas alors elle reprit :

  — Ça se voit dans vos yeux, dans votre manière de vous comporter l'un avec l'autre. Et j'ai l'impression que ça te fait mal. De ressentir ça. Je vois de la culpabilité, de la peur, de la tristesse dans tes yeux. Et je crois avoir raison en pensant que Leta y est pour quelque chose là-dedans.

  Des larmes emplirent les yeux du jeune homme.

  — Peut-être... admit-il alors, la gorge serrée. C'est juste que... Je ne sais pas... Tout ça me semble si... irréel... Et rapide... J'ai l'impression de ne pas avoir le droit. Parce que... oui... il y avait Leta. Et...

  Sa voix se brisa alors sa mère murmura en lui souriant d'un air rassurant :

  — C'est normal de te sentir comme ça, Thésée. Je comprends. Mais tu as le droit d'aimer Aysha. Je sais que tu te sens coupable envers Leta. Mais il n'y a pas de règle. Tu ne peux pas te mentir à toi-même. Tout comme tu ne peux pas faire taire ce qui gronde en toi. J'ai toujours su que tu aimais Aysha. Tu semblais être heureux d'apprendre qu'elle serait à la maison quand vous étiez plus jeunes. Tu faisais toujours en sorte de ne pas être de sortie quand elle était là. Tu la regardais avec tant de tendresse. Tu as aimé Aysha avant même d'aimer Leta. Alors, tu n'as pas à te sentir coupable de laisser parler tes sentiments.

  — Mais... J'ai peur... Parce que... Leta est morte... Et je suis effrayé à l'idée qu'Aysha... J'ai si peur de la perdre. Je ne veux pas la perdre.

  Il n'arrivait pas à croire qu'il avait dit cela. Mais il était trop tard. Les mots étaient sortis et il ne pouvait les effacer. Anne posa une main sur la joue de son fils.

  — Je sais que c'est effrayant. Mais Aysha est forte. C'est une dure à cuire. Elle a insulté la mort à de nombreuses reprises. C'est une survivante et une battante. J'ai conscience que c'est dur. Mais ne donne pas à la peur une raison de ne pas t'offrir le bonheur.

  — Elle ne veut de moi que comme un ami. Elle me l'a fait comprendre, je crois.

  — Si tu l'as crue, c'est que tu es un plus grand idiot que je pouvais l'imaginer, ne put s'empêcher de dire la vieille femme. Mais comment veux-tu savoir ce qu'elle pense de toi, si tu ne vas pas clairement lui demander ? Comment oses-tu dire que tu n'as aucune chance si tu n'as pas tenté une seule fois ?

  Thésée fixa sa mère longuement, ne sachant comment réagir. Il était totalement perdu.

  — Écoute, reprit alors Anne. Tu es un homme, maintenant. Mais, tu resteras toujours mon petit garçon qui refusait de manger ses bonbons si ils n'étaient pas triés par couleur. Tu resteras toujours mon enfant. Celui qui pensait que les nuages étaient les nids des oiseaux. Celui qui voulait toujours qu'on le porte en le faisant tourner comme s'il pouvait voler. Celui qui piquait les peluches de son frère. Mais aussi celui qui allait bordait son benjamin et lui racontait des histoires pour l'endormir. Celui qui s'émerveillait devant chaque fleur qu'il voyait. Celui qui était le seul à pouvoir rendormir Norbert lorsqu'il faisait un cauchemar. Celui qui était tellement angoissé d'entrer à Poudlard qu'il a failli oublier tous ses bagages sur le quai. Je t'ai vu grandir, mais à aucun moment je ne l'ai accepté. Tu as grandi trop vite. Aysha fut la première personne dont tu es tombé amoureux. Et j'étais aux anges, car j'adorais cette enfant. Peu importe ce que les autres parents pouvaient dire sur elle, moi, je l'adorais. Elle m'aidait souvent avec les Hippogriffes et je crois qu'il s'agissait des rares moments où je pouvais avoir aussi ton aide. Elle avait un talent fou pour conter les histoires, sûrement quelque chose qu'elle tient de sa mère. Aysha est probablement celle qu'il te faut. Celle dont tu as besoin. Celle qui te sauvera.

  — Elle m'a déjà sauvé. Pas seulement la vie. Elle m'a sauvé moi. Tout entier.

  Avec un sourire triste, Anne se leva et alla embrasser le front de son fils avant de venir essuyer la larme qui roulait sur la joue de son fils.

  — Elle nous a tous sauvés, fit alors sa mère. Sans s'en rendre compte. Elle a sauvé Norbert dans le remue-ménage qu'il subissait à Poudlard. Elle t'a sauvé toi. Elle a sauvé Leta en même temps que ton frère. Elle a sauvé April sans le savoir. Elle a sauvé ton père et moi en devenant la fille que nous n'avions jamais eue. Plus nous apprenions à la connaître, plus nous voyions Kate en elle.

  Thésée ne sut quoi dire face à la mention de sa jeune sœur, décédée à l'âge d'un an de la Dragoncelle. Il n'en avait jamais parlé à personne. Norbert n'avait même que vaguement entendu parler d'elle.

  — Tu mérites d'être heureux, Thésée. Et je crois que c'est en Aysha que tu trouveras ton bonheur.

Louise Garénaux - Auteure passionnée
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