Les Animaux Fantastiques
Tome 1


Chapitre six

Aysha resta allongée dans son lit pendant des heures, les yeux ouverts, contemplant le plafond qu'elle ne pouvait voir dans l'obscurité. À côté d'elle, April dormait paisiblement, bercée par de doux rêves qu'Aysha tentait en vain d'imaginer. Elle ne savait pas quelle heure il était, si minuit était passé ou même si le soleil s'était levé. Au bout d'un certain temps, qui paraissait infini, elle tira la couverture, découvrant ses jambes, et s'assit sur le bord de son lit.

- Tu viens de te réveiller ? demanda April qui avait tourné la tête vers son amie.

- Et toi ? murmura-t-elle sans répondre à sa question.

- Tout juste, répondit l'Auror en s'asseyant à son tour. Mais ne t'inquiètes pas, tu n'y es pour rien.

Aysha se contenta de hausser les épaules avant de se lever pour tirer les rideaux. Dehors, elle pouvait voir les couleurs blanches apparaître à l'est.

- Nous devrions peut-être descendre. L'aube devrait réveiller nos compagnons, chuchota l'Occlumens d'une voix calme. S'ils ne font pas les marmottes.

Or, en effet, lorsque les deux amies arrivèrent dans le salon, habillées de vêtements Moldus, elles remarquèrent qu'elles étaient les dernières.

- Bien dormi ? demanda William, jovial.

Seule April répondit d'un mouvement de la tête, tandis que son amie s'installait à côté de Helena, ignorant les regards interrogateurs que lui lançait Thésée.

- Bon ! s'exclama l'hôte en se levant d'un bond. Comme vous le savez, notre but est de trouver, et non de battre, Grindelwald et ses fidèles. Pour cela, nous allons nous séparer en groupe de deux - ou de trois - et chercher le moindre indice, la moindre chose étrange qui pourrait nous mener à leur cachette. Aucun de nous ne devra se retrouver seul, à aucun moment, et pour aucune raison. C'est compris ?

Tous acquiescèrent d'un mouvement de la tête et il reprit :

- On ne sait pas combien de temps vont durer nos recherches. Nous avons peu d'indices qui nous amènent à penser qu'ils sont dans cette ville. Mais cette ville est grande. Alors, nous ne pouvons nous permettre d'abandonner car nous ne trouvons rien au bout de quelques jours.

Il fit une pause, fixant tous ses auditeurs avant de continuer :

- Notre cher Thésée s'est chargé de faire les groupes, je vais donc lui laisser la parole.

- Très bien, murmura l'Auror en se levant tandis que William s'asseyait. Voici les groupes : Helena et Emy, April, William et Jacob, Norbert et Tina, Dean et William et, enfin, Aysha et moi.

Tous se tournèrent vers leur⋅s partenaire⋅s, y compris Norbert et Tina, les joues rouges. Ils se mirent donc bientôt en route, ne sortant que groupe après groupe, laissant un intervalle assez long entre les sorties pour ne pas attirer l'attention sur eux.

- Tu penses que nous devrions aller où ? demanda Thésée alors qu'ils sortaient à leur tour.

- Des lieux que Grindelwald est susceptible d'utiliser.

- Et quels sont ces lieux ?

- Je ne sais pas ! Je ne suis pas Grindelwald ! s'exclama Aysha qui avançait d'un pas si rapide que son homologue peinait à la suivre.

- Et je peux savoir où tu vas comme ça ?

- Je ne sais pas, répondit-elle sur un ton sec.

- Tu es sûre que ça va ?

- Tu as choisi de te mettre avec moi pour me poser des questions ?

- Pas du tout, renchérit maladroitement Thésée. Ça fait longtemps que l'on n'avait pas travaillé ensemble. Je suis heureux de pouvoir recommencer.

- Heureux ? Vraiment ?

- Oui ! Pourquoi cela t'étonne ?

- Tout simplement, car la plupart des personnes qui ont travaillé avec moi auraient préféré se trouver autre part. Et ils ne prenaient pas la peine de le cacher. Sûrement parce que je n'ai pas de sentiments.

- Bien sûr que si tu as des sentiments ! s'exclama le sorcier sans prendre la peine de rester discret.

- Ah oui ? Et, comment tu le sais au juste ?

- Tout le monde en a !

- Parce que je suis tout le monde, maintenant ?! hurla l'Occlumens en s'arrêtant, attirant les regards de certains passants. J'ai plus l'impression d'être un monstre. Et non, murmura-t-elle, coupant son ami qui avait ouvert la bouche pour répondre, ne dis pas le contraire. Parce que c'est vrai !

- Mais...

- J'ai dit non ! l'interrompit à nouveau Aysha.

- Et moi je dis pourquoi ?!

Ils se regardèrent, se lançant des regards noirs et la jeune femme finit par lui répondre plus calmement, les larmes aux yeux :

- Je l'ai vu dans leurs yeux. Je l'ai vu dans le regard de ceux qui étaient censés être ma famille. J'ai vu du jugement et du dégoût. Je l'ai vu tous les jours, à chaque fois qu'ils me regardaient. Ils devaient être ma famille !

- Tu as une grande famille. Une grande et véritable. Tu es ma famille ! Les liens du sang ne sont pas les seuls à définir une vraie famille.

- Tu crois que je ne le sais pas ?! Je considère Norbert comme mon frère et Leta... était comme une sœur. Je les aimais tous les deux, mais je les ai perdus ! Ils ne sont plus ma famille, car je suis un monstre et personne ne veut d'un monstre dans sa famille.

- Ne dis pas n'importe quoi, soupira Thésée. Tu n'es pas un monstre, ou alors, tout le monde l'est.

- Tu...

L'Occlumens s'arrêta.

- Tout va bien ? s'inquiéta le jeune homme en fronçant les sourcils.

- Oui... Je... balbutia-t-elle en secouant la tête. Je croyais avoir vu... Enfin, peu importe... Ce n'est rien.

Même s'il n'en était pas convaincu, l'Auror ne répondit pas. Ils passèrent donc la journée à chercher des indices, sans s'adresser un seul mot, ne prenant même pas la peine de manger à l'heure du déjeuner. Lorsque la lumière déclina, ils prirent la décision de rejoindre la demeure de leur hôte. Quand ils arrivèrent dans le salon, ils constatèrent qu'ils étaient les derniers.

- Vous voilà enfin ! s'exclama William en les invitant à s'asseoir.

- Désolé de vous avoir fait attendre, murmura Thésée, le regard posé sur sa partenaire qui s'installait entre Helena et April.

- Vous avez trouvé quelque chose ? demanda Emy sur un ton ferme.

- Non... répondit-il, l'air déçu. Et vous ?

- Rien... s'exaspéra Helena en poussant un soupir.

- Il ne faut pas perdre espoir. Nous recommencerons demain.

- Les groupes vont changer ? questionna Aysha d'un air innocent.

Thésée la fixa quelques secondes avant de chuchoter :

- Je vais y réfléchir cette nuit.

- Oh, ne te prive pas d'une nuit de sommeil dont tu as besoin. Je peux m'en occuper.

- Tu es en train de dire que je ne peux surmonter une nuit blanche ?

- Je dis que tu as une sale tête et que ça ne me coûtera rien.

Un silence s'installa que personne n'osa briser. Ils restèrent ainsi pendant quelques minutes avant que Thésée ne se décide à se lever et à demander :

- Mr Smith, vous avez peut-être besoin d'aide en cuisine ?

- Oh, appelez-moi William. Et, ce ne serait pas de refus. Manuela, peux-tu t'occuper des invités ?

La jeune femme acquiesça et les deux Aurors sortirent de la pièce, non sans un regard de l'aîné des Dragonneau pour Aysha. Cette dernière se leva et annonça :

- Je vais... dans ma chambre. Excusez-moi.

Sur ces mots, elle s'éloigna et disparut.

- Bon sang... murmura Emy d'un air grincheux. Qu'est-ce qu'elle est bizarre !

- Emy ! s'écria Helena, abasourdie.

- Quoi ? Tu ne vas quand même pas dire le contraire. Elle est froide et de très mauvaise compagnie.

- Comment oses-tu dire ça ?! C'est notre sœur !

- Et parce que c'est notre sœur, on doit dire qu'elle est normale ?

- C'est notre sœur. On se doit de la protéger, l'aider, l'aimer. Contrairement à nous, elle n'a pas reçu l'amour qu'elle méritait.

- Elle n'est pas la seule à avoir perdu ses parents.

- Pourtant, elle est la seule à ne jamais les avoir connus, à avoir été détestée par ceux qui devaient remplir le rôle de père et mère, et tout ça, à cause d'une chose qu'elle ne pouvait contrôler. Norbert, déclara la jeune femme en se retournant vers le concerné, c'est toi qui la connaît le mieux. Qu'est-ce qu'on doit faire ?

Tous les regards étaient à présent tournés vers le magizoologiste qui fixait le sol.

- Je ne... Peut-être... balbutia-t-il. Je vais... lui parler.

Il se leva sous les regards de ses camarades, mais, étrangement, celui de Tina fut le seul qu'il remarqua. À peine eut-il atteint le haut des escaliers qu'il entendit la dispute reprendre dans le salon.

- Ça va, Aysha ? demanda-t-il en refermant la porte derrière lui.

N'obtenant pas de réponse, il leva la tête et vit son amie faire les cent pas, retenant ses larmes.

- Visiblement, non...

L'auteur s'approcha et arrêta la jeune sorcière pour lui murmurer, comme il avait l'habitude de le faire pour rassurer l'une de ses créatures :

- Calme-toi. Ça va. Je suis là.

L'Occlumens lui jeta un regard peiné avant de s'asseoir sur son lit et de lui répondre :

- Je suis désolée, je n'aurais pas dû partir comme ça... C'est juste que...

- Tu aimes toujours mon frère.

Aysha leva la tête et plongea ses yeux verts dans le regard clair de son ami.

- Ça se voit tant que ça ? demanda-t-elle, les larmes aux yeux.

- Non. Je le sais uniquement, car je te connais bien et que je sais comment tu fonctionnes. Mais... je ne comprends pas pourquoi tu ne lui dis pas.

L'Auror le regarda pendant quelques secondes avant de murmurer :

- Parce que Leta est morte, qu'elle était ma... sœur, qu'il ne m'aime pas et je ne suis pas la bonne personne pour lui. Je ne peux que lui faire du mal.

- Comment peux-tu le savoir ? Si tu...

- Tu trouves normal que toi, Norbert Dragonneau, me donne des conseils sur ma vie amoureuse alors que tu es incapable d'avouer à Tina que tu l'aimes ? l'interrompit la jeune femme en se mordant la lèvre inférieur.

- Non, c'est vrai... Mais, là, on parle de toi.

- Non. J'en ai assez de parler de moi.

- Mais... commença Norbert, abasourdi.

- Comme je fais les équipes demain, je te mettrai avec Tina et tu as intérêt à lui parler.

- Mais je suis incapable de lui parler ! s'exaspéra-t-il en se laissant tomber sur le lit d'April.

- Alors, imagine que c'est un Botruc.

Le magizoologiste la regarda d'un air perdu avant de répondre :

- Mais, je ne peux pas imaginer que c'est un Botruc !

- C'est ce que je fais moi. Enfin, je m'imagine que les humains sont des créatures magiques. Ça m'aide beaucoup.

- Ah oui ? s'étonna l'auteur en souriant. Et moi, je suis quoi pour toi ?

- Toi, tu restes Norbert. Tu es déjà suffisamment une créature fantastique comme ça.

- Et Thésée ?

Aysha ne répondit pas tout de suite. Elle laissa un silence s'installait pendant quelques secondes avant d'annoncer :

- C'est un Oiseau-Tonnerre.

Le jeune homme lui adressa un sourire auquel elle répondit par un soupir amusé.


Le lendemain, Aysha fut la première levée, avant même l'aube, et elle en profita pour lire le livre de son ami.

- Déjà debout ? fit une voix derrière elle.

Elle leva la tête, détachant son regard de l'explication de ce qu'était un phénix, et regarda Thésée lui adresser un sourire.

- Tu as fait les équipes ? demanda-t-il en venant s'asseoir à côté d'elle.

- J'ai laissé Tina et Norbert ensemble, si c'est ce que tu veux savoir.

- C'est génial. Ils vont bien finir par se lancer, pas vrai ?

- Je l'espère...

Ils ne se parlèrent plus jusqu'à l'arrivée du reste de leurs camarades.

- J'espère que vous avez passé une bonne nuit ! s'exclama William en leur adressant un immense sourire. La mission reste la même que la veille, à la différence qu'Aysha a décidé de changer les groupes. Pourrions-nous les avoir ?

- Oh... au fait, ils ne changent pas tous. Thésée... tu es à présent avec Jacob. William et Manuela avec Helena. Dean avec Emy et April avec moi. Norbert et Tina, vous restez ensemble.

Tous acquiescèrent et les premiers à sortir furent Norbert et Tina. Une fois sortis, ils commencèrent à avancer sans un mot.

- J'ai l'impression qu'il y a un complot contre nous... murmura l'Auror assez fort pour que son camarade l'entende.

- Ah oui ? Pourquoi dites-vous cela ?

- On parle dans notre dos et on se retrouve mystérieusement toujours ensemble.

- Vous préféreriez être avec quelqu'un d'autre ? demanda maladroitement le sorcier, peinant à cacher sa déception.

- Oh, non... Ce n'est pas... ce que je voulais dire, balbutia la jeune femme. Je suis... vraiment... heureuse d'être avec vous.

- Vraiment ?

- Nous pourrions nous consacrer à la mission ?

Norbert hocha la tête, le cœur léger. Jamais il ne s'était senti aussi bien, pas même lorsque c'était Leta qui envahissait ses pensées.

- Norbert ! s'exclama soudain Tina en pointant quelque chose du doigt. Regardez là-bas !

Le magizoologiste s'exécuta rapidement et, sans un mot, tourna la tête vers une femme à l'air hautain qui lui disait vaguement quelque chose.

- Elle était là lorsque Grindelwald avait convoqué ses fidèles. Elle était à ses côtés.

Soudain, tout revint à l'esprit de Norbert et il sentit une étrange colère monter en lui.

- Nous devrions peut-être prévenir les autres, proposa la jeune femme en serrant sa baguette dans sa poche.

- Nous prévenir de quoi ? fit une voix féminine derrière eux.

Ils se retournèrent subitement et se retrouvèrent nez à nez avec Emy et Dean.

- Vous nous avez suivis ? demanda Tina, ne pouvant cacher sa surprise.

- Bien sûr que non. On est juste tombé sur vous par hasard, répondit Dean avec un sourire railleur.

- Quelle drôle de coïncidence, marmonna l'Auror tandis qu'elle fixait Emy, sûre qu'elle ne disait pas toute la vérité.

- Bon, alors, qu'est-ce que vous vouliez nous dire ? demanda la jeune femme d'un air impatient.

Tina se retourna et eut la surprise de découvrir que la femme qu'ils avaient repérée avait disparu.

- Elle est partie... chuchota-t-elle, déçue.

- Qui ? questionna Dean. Qui est parti ?

- La femme. La partisante de Grindelwald.

- C'est malin... râla Emy. Vous auriez pu faire attention.

- Mais c'est vous qui nous avez dérangés.

- Bon, laissons tomber. On repart de notre côté. Ah, et, pitié, Norbert, n'étalez pas vos problèmes de couple avec Aysha.

Un sourire malicieux étira les lèvres de la jeune femme et elle s'éloigna avec son partenaire.

Louise Garénaux - Auteure passionnée
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